Coup de coeur pour la rotule FLM CB38

1 – Présentation

Photographe amateur, je pratique essentiellement le paysage en noir et blanc, appareil sur pied : j’ai été autrefois géomètre-topographe, habitué à travailler avec des appareils de haute précision (théodolites, niveaux) sur de lourds trépieds en bois très stables.

Depuis j’ai changé de métier, mais conservé ce goût en photographie, des beaux appareils (Hasselblad, Graflex Speed Graphic, Linhof Kardan-bi 13×18) utilisés sur un trépied, qui permet de peaufiner son cadrage, attendre la bonne lumière, profiter des vitesses lentes qui donnent de la vie à la végétation. Le temps nécessaire surtout à « prendre le temps » d’être dans le paysage, de s’en imprégner.

Je travaille actuellement sur une série de paysages d’un ravin du pays Basque, photographié dans les mêmes cadrages exactement, aux quatre saisons : une balade de 400m de dénivelée, en terrain accidenté, dans la neige cet hiver, et sous la pluie cet été. Chaque saison faisant l’objet d’un tirage avec virage (sélénium, sépia, or) différent. Le genre de projet évidemment impossible à réaliser à main levée, puisque à chaque nouvelle série, il faut refaire les cadrages le plus exactement possible, planches-contact en main. Et le ravin, avec son couvert végétal dans le brouillard est assez sombre ; la vitesse utilisée est généralement entre 1/8e et 2s. Le trépied est indispensable.

2 – Le matériel

Si j’ai autrefois fait suivre sur le terrain,  mon gros et lourd trépied Manfrotto 058, j’ai depuis récupéré deux autres pieds : un vieux Linhof en aluminium, encombrant mais étonnamment stable et léger, que j’utilise en portrait, et un petit trépied en bois d’origine inconnue, genre Berlebach. Au départ j’ai considéré ce trépied comme juste bon pour les photos de famille au retardateur. Puis, voyant que les photographes travaillant à la chambre grand format utilisent encore souvent des trépieds en bois, et me souvenant des trépieds de chantier de ma jeunesse, j’ai commencé à l’utiliser.

Depuis, sauf pour la 13×18 qui nécessite un très gros trépied, j’utilise exclusivement en extérieur ce trépied en bois, pour le compromis poids-rigidité, la possibilité d’enfoncer profondément ses pointes dans le sol comme on le fait avec un trépied de géomètre, et le
contact toujours agréable du bois notamment en hiver. Et peut-être aussi le souvenir de mon premier métier, dont j’aime à retrouver les sensations.

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J’ai vite remplacé sa petite rotule d’origine à deux axes, contre une vieille rotule Gitzo à 3 axes. Cette rotule permettait des cadrages plus précis, mais avec trois inconvénients quand même :

–  régulièrement, l’appareil piquait brutalement du nez dans un sens ou dans l’autre, si l’une des poignées n’était pas assez serrée ;

– le poids et l’encombrement de la rotule et ses poignées, gênants quand on veut avant ou après la prise de vues, accrocher le trépied au sac à dos : la rotule déséquilibre, les poignées dépassent, le trépied glisse dans les sangles. Même dans le coffre de voiture, les longues
tiges sont souvent gênantes ;

– l’avantage du réglage séparé des trois axes n’est pas si évident quand la tête du trépied lui-même, n’est pas exactement de niveau, ce qui est quasiment toujours le cas en terrain accidenté où l’on fait ce que l’on peut pour planter son trépied. La moindre correction sur un des axes, oblige quasiment toujours à corriger les deux autres, et on n’y arrive que par approximations successives.

rotule gitzo 3 axes

Aussi j’ai commencé à envisager l’achat d’une rotule boule, principalement pour les questions de poids et d’encombrement.
Mais avec quelques incertitudes et hésitations : ça ne me semblait pas un matériel aussi « sérieux » qu’une rotule trois axes. Cherché conseil dans les forums photo, et trouvé des avis divergents sur la question. Certains n’aiment pas les rotules boules, notamment avec des chambres grand format. Mais un avis qui revenait quand même régulièrement était qu’avec une rotule boule de bonne qualité (et souvent, la marque FLM en exemple), on en avait pour son argent, et qu’elle complétait ou même remplaçait avantageusement la trois axes.
L’exemple de Michael Kenna, dont j’aime beaucoup les images, et qui utilise aussi l’Hasselblad en paysage, avec une rotule à boule, a fini de me convaincre.

3 – La rotule boule FLM

C’est sur internet que j’ai connu les rotules FLM par un article élogieux sur leur qualité de fabrication sans compromis, la qualité « made in Germany », et leur bon rapport qualité-prix, ainsi qu’une visite en photos de l’usine.

Je me suis dit alors que lorsque j’achèterais ma rotule, ce serait dans cette marque, bien qu’on en trouve dans toutes les grandes marques d’accessoires photo : pour cet aspect « qualité artisanale » que n’ont pas les marques plus largement diffusées, un large choix de modèles, et des prix largement plus abordables que d’autres constructeurs dont la réputation de qualité n’est plus à faire.

J’ai attendu assez longtemps, car ça n’était quand même pas un achat prioritaire, des doutes encore sur le bien-fondé de cet achat, et… parce que le budget photo est toujours ce qu’il est !

Il a fallu quelques expéditions photo en terrain vraiment accidenté, et la proposition d’une campagne de photos spéléo, avec l’obligation d’utiliser un trépied qui puisse tenir dans un « kit-bag », pour que je me décide enfin à commander cette fichue rotule boule.

Mais j’étais tout de même un peu inquiet, de savoir si cette petite rotule (une Centerball 38, modèle tout ce qu’il y a de simple et basique chez FLM, qui en fait aussi de bien plus grosses, et sophistiquées) allait me convenir. Est-ce que l’appareil n’allait pas basculer dans tous les sens ? Est-ce que je pourrais régler correctement l’horizontalité (habitant la Charente-Maritime, je fais régulièrement des photos dans des marais plats à l’infini) ?

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À réception du colis, double étonnement : cette rotule est vraiment compacte, petite, et donne pourtant le même sentiment de qualité, de sécurité, de belle finition, que l’Hasselbad ELX qu’elle est destinée à accueillir. Un alliage de simplicité et de solidité, un bel objet épuré que l’on a plaisir à toucher, tourner. Oui, un bel objet.

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Seconde bonne surprise : la plate-forme ronde de la rotule FLM est plus petite que celle, rectangulaire, de ma vieille tête 3 axes, et mon adaptateur rapide Hasselblad dépasse. Mais ses deux pas de vis me permettent de choisir le meilleur centrage de celui-ci sur la rotule.
Avec le pas de vis 1/4″, l’appareil tend à piquer du nez. En utilisant le 3/8″, il est stable, bien équilibré, même avec un grand-angle ou un télé-objectif.

Étonnement, encore : comme l’assemblage boule/embase est entièrement mobile, pas besoin de contre-écrou pour serrer l’appareil sur la rotule ! Tourner l’appareil ou la boule jusqu’au blocage, et voilà…
Tout simple… Pas besoin non plus d’aligner l’appareil ou l’adaptateur sur la plateforme : tout tourne !

Essais concluant à la maison, avec l’Hasselblad, comme avec la Speed Graphic. Puis, un après-midi entier sur le terrain :

– au transport : le poids, l’encombrement, et même l’esthétique, sont le jour et la nuit, comparativement avec la rotule 3 axes et ses longues poignées ;

– l’appareil ne pique plus jamais brutalement du nez, ou en arrière, ou sur le côté ;

– le cadrage est étonnamment facile (même dans le vent souvent très fort ici) : juste tenir l’appareil doucement et fermement entre les mains, comme on le ferait à main levée, et serrer doucement le SEUL écrou. À aucun moment je n’ai éprouvé le regret des réglages séparés, dont je pense désormais qu’ils ne sont intéressants réellement, que si
le trépied lui-même, indépendamment de la rotule, est correctement mis à niveau avec le niveau à bulle (ce que l’on fait toujours en topographie, et les appareils de topographie ont en outre, pour cette raison, une embase intermédiaire ou « triangle à vis calantes » entre
le trépied et l’appareil). Au contraire, avec la rotule boule, on est dans un cadrage à la fois très précis, et intuitif. On arrive très facilement à n’intervenir que sur l’axe voulu (en fait,
la notion même, d’axe, n’a plus vraiment de sens). Réellement, j’ai trouvé l’horizontalité bien plus facile à régler, avec la rotule FLM, qu’avec la trois axes dans mes conditions habituelles.

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– un seul écrou, au lieu de trois, surdimensionné, jamais dur, jamais coincé… Pour autant la boule n’est jamais libre et l’appareil livré à lui-même, c’est un très, très grand confort. Et comme tout tourne : l’écrou est toujours bien placé, et tombe parfaitement sous les doigts.
Pas besoin de « fucking manual » !

– j’ai marché longtemps avec le trépied sur l’épaule, l’appareil fixé dessus : à aucun moment je n’ai eu de doute, d’appréhension (une fois vérifiée tout de même, le bon positionnement du boîtier dans les rails de l’adaptateur rapide…) Totale confiance dans cette petite boule.

Hasselblad 500 ELX et FLM

4 – Résultats du test

Voilà. De retour à la maison, un petit mail à Thierry Rebours pour lui dire : « ravi de mon achat, je n’ai qu’un regret : ne pas avoir acheté cette rotule plus tôt ». Puis un avis sur mon forum photographique favori, et même sur Facebook, pour partager mon enthousiasme : « cette rotule FLM, c’est de la « ball »…

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À la demande de Thierry pour le blog de Point Nodal, ce compte-rendu un peu plus détaillé, mais dont pas une seule ligne n’est pas sincère ou excessive.

Oui, je ne regrette qu’une chose : ne pas l’avoir achetée plus tôt.
Plus qu’un accessoire, c’est un outil photographique à part entière, qui facilite grandement la prise de vue, et la rend bien plus intuitive et agréable. Et en plus, un bel objet.

Alors si ces quelques lignes peuvent aider à lever les dernières hésitations de certains, et contribuer à faire connaître une marque qui n’a pas encore une notoriété aussi largement établie que d’autres, mais le mérite amplement, j’en serai heureux.

Jacques Bon

autoportrait devant le tunnel d’accès à la salle de la Verna du gouffre de la Pierre Saint-Martin

Texte et photos Jacques Bon, juillet 2011

http://cafcom.free.fr
http://cespetiteschoses.net

http://www.flickr.com/photos/zcorner

Edit Janvier 2019 :quelques rares exemplaires sont disponibles sur cette page https://pointnodal.wordpress.com/pied-et-rotules/

8 réflexions sur “Coup de coeur pour la rotule FLM CB38

  1. Bonjour, J’ai exactement le même trépied en bois que vous. J’ignore sa marque car le brocanteur qui me l’a vendue ne le savait pas. Comment avez retiré sa rotule d’origine. L’avez vous séparé du tube central ?

    Cordialement.

    • Bonsoir,

      Il suffit généralement de dévisser la rotule de la colonne centrale préalablement bloquée. Un peu de dégrippant ne nuira pas à la manœuvre.
      Certains pieds comme les Manfrotto ont une vis de blocage par en dessous à retirer.

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  5. bonjour, j’ai vu que vous possédez une graflex speed graphic, petite question, je n’arrive pas à fixer la mienne sur un plateau standard manfrotto, visiblement le pas de vis n’est pas le meme? et je n’arrive pas à trouver d’info à ce sujet… pourriez-vous m’aider? merci. cordialement p mougin

    • Normalement les Speed ont un pas de vis 3/8 (gros pas) plus gros que la petite 1/4 d’un compact ou 24×36.
      Vous pouvez commander une plaque ad-hoc chez Manfrotto sans problème.

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